« Voici mon commandement : aimez-vous les uns les autres... ». Dans les lectures de ce sixième dimanche de Pâques, nous entendons beaucoup parler du commandement d'amour de notre Seigneur. Pourtant, ce commandement semble étrange aux oreilles modernes : un commandement d'aimer. En effet, nombreux sont ceux qui, dans notre société actuelle, pensent que l'amour n'est qu'un sentiment, une inclination provoquée en nous par la rencontre de quelqu'un ou même de quelque chose d'extérieur à nous. Ainsi, certains peuvent se demander : « Comment peut-on nous commander d'aimer ? » Plus encore, même si nous pouvons nous décider à aimer, quel genre d'amour Jésus nous ordonne-t-il de donner ?

Devons-nous nous aimer les uns les autres comme on aime son film préféré, son sport favori ou sa boisson préférée ? Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que Jésus ne nous ordonne pas de nous aimer les uns les autres comme on aime Stars Wars, ou les Canadiens de Montréal, ou un bon verre de scotch. Nous aimons ces choses pour le plaisir qu'elles nous procurent, et non pour le bien que nous souhaitons leur apporter. Nous ne les aimons pas pour elles-mêmes, comme si elles étaient nous-mêmes. 

Devons-nous nous aimer les uns les autres comme nous aimons nos animaux de compagnie ? Bien que l'on puisse et que l'on doive aimer son animal de compagnie plus que son verre de scotch, il serait erroné et désordonné de l'aimer plus que d'autres personnes, en particulier sa femme ou ses enfants. Les animaux domestiques ne sont pas des personnes, et ils ne sont certainement pas nos enfants - même si nos enfants se comportent parfois comme nos animaux domestiques - et nous ne devons donc pas les traiter comme tels. Par conséquent, Jésus ne nous ordonne pas de nous aimer les uns les autres comme nous aimons nos animaux de compagnie, car ce type d'amour est loin d'être satisfaisant.

Qu'en est-il de l'amour que nous avons pour nous-mêmes ? Devons-nous nous aimer les uns les autres de cet amour ? Étant donné que l'Écriture nous donne cela comme le deuxième plus grand commandement, cela doit être notre réponse, et pourtant, beaucoup d'entre nous savent qu'il est tragiquement possible pour une personne de se haïr elle-même. Par conséquent, il doit y avoir un amour encore plus grand que l'amour de soi auquel Jésus nous appelle à nous aimer les uns les autres. Quelle est cette forme d'amour ?

 Écoutons Jésus : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ». Oui ! Nous devons nous aimer les uns les autres du même amour dont Jésus nous a aimés et dont le Père l'a aimé. En d'autres termes, nous devons aimer de l'amour de Dieu. Un amour désintéressé, un amour qui se tourne vers l'autre, un amour qui comprend que la personne en face de vous est faite à l'image et à la ressemblance de Dieu, et qu'elle doit donc être aimée, et non utilisée, chérie, et non rejetée, un amour qui se demande quel bien je peux donner, plutôt que quel bien je peux obtenir. Tout être humain désire être aimé, mais tout être humain désire aussi aimer. Se dépenser pour l'autre sans compter, se perdre dans l'amour pour se retrouver dans l'amour, jusqu'à aimer à son degré le plus éminent - donner sa vie pour ses amis.

Nous devons donc nous aimer les uns les autres avec l'amour de Dieu. Un amour surnaturel, qui aime non seulement les amis, mais aussi ceux qui ont le potentiel de devenir nos amis, c'est-à-dire que nous devons aimer même nos ennemis. Comme l'a dit Jésus, « Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent » (Mt 5,44). 

Nous avons vu que nous devons nous aimer les uns les autres avec l'amour de Dieu ; cependant, notre question initiale persiste : comment pouvons-nous recevoir l'ordre d'aimer ? Plus précisément, comment pouvons-nous recevoir l'ordre d'aimer d'un amour qui dépasse nos capacités naturelles ? Le pape Benoît XVI nous aide à répondre à cette question lorsqu'il affirme dans son encyclique Deus Caritas Est que nous pouvons recevoir l'ordre d'aimer avec l'amour de Dieu parce que celui-ci nous a d'abord été donné. Comme nous le dit saint Jean dans notre deuxième lecture : « En ceci consiste l'amour : ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c'est lui qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils pour expier nos péchés.

Vous voyez, l'amour n'est pas simplement un sentiment, mais il est dans la volonté. Ainsi, quelle que soit la situation ou notre réaction émotionnelle, nous pouvons toujours vouloir aimer. Comme l'a dit saint Jean de la Croix, « Là où il n'y a pas d'amour, mettez de l'amour et vous trouverez de l'amour ».  

Que le Seigneur vous bénisse !

Père Jan Kusyk

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